Moscou chérit les siens
L’édition du MIFF 2005 nous a offert une
sélection très inégale avec des films excellents et des nanars à peines
dignes de la télévision. Le palmarès couronne un film russe assez
anecdotique et relance une vieille polémique soviétique…
Le Festival International du Film de Moscou se devait, à l’époque
soviétique, de démontrer la supériorité du cinéma socialiste sur le cinéma
bourgeois. De fait, les palmarès couronnaient invariablement des films
soviétiques ou provenant de pays communistes. On se souvient toutefois de
l’exception faite pour « 8 ½ » de Fellini, dont le 1er prix avait
été à l’origine d’une bataille qui était montée jusqu’au politburo…
Depuis l’époque Mikhalkov, (depuis 1991, donc), le MIFF bénéficie d’une
ouverture sans précédent… mais l’édition 2005 nous a semblé faire un pas en
arrière. Lorsque « Svoi » (les nôtres) a remporté le grand prix en 2004,
personne n’a contesté la décision du jury tant le film russe dominait la
sélection. Mais ce n’est pas le cas pour « Kosmos kak predtchoustvie »
d’Alexeï Outchitel, un film nostalgique bon enfant sur l’époque de Gagarine
qui n’apporte pas beaucoup d’eau au moulin de l’industrie cinématographique.
La critique a tiqué alors qu’au moins trois autres films de la sélection
apparaissaient nettement supérieurs. « Dear Wendy » de Thomas Vinterberg, « Chumscrabber »
d’Arie Posin et « Frozen Land » d’Aku Louhimies dominaient très nettement. A
l’inverse, notons aussi que la présence de nanars tels que « Bal-Can-Can »,
« Welcome Home », « le berger » et « La Vita che Vorrei » ont de quoi
inquiéter les amateurs du festival. Qui a donc placé ces 5 très mauvais
films dans la sélection ?
Le très doué Vinterberg a tout de même empoché le prix du meilleur
réalisateur, et « Chumscrabber » celui du public (pour une fois
incontestatblement plus éclairé que le jury).
Pourquoi « Kosmos kak predtchoustvie » a-t-il reçu le Saint-Georges ?
Avançons une hypothèse basée sur des faits très significatifs du
fonctionnement de l’industrie russe du cinéma. Outchitel est un pote de
Mikhalkov, patron népotique du festival. Il a retiré son film à la dernière
minute d’un autre festival russe (Kinotavr, organisé par un grand ennemi de
Mikhalkov) le mois dernier pour faire partie du MIFF (un festival de
catégorie « A » tout de même)... Certains avancent qu’il a reçu des
promesses de Mikhalkov. Comme son film « Progoulka » n’avait rien reçu en
2004, il méritait bien une revanche. C’est ce qu’on en tout cas décidé les
jurés, à la stupéfaction générale.
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