Venise célèbre le cinéma
russe,
le public suivra-t-il ?
Le cinéma russe figure
toujours en bonne place parmi les récompenses des plus prestigieux
festivals. Samedi dernier, c’était au tour d’Andreï Zviagintsev qui
recevait le Lion d’or de la 60ème Mostra de Venise pour son film
« le retour ». L’année précédente, Konchalovski recevait le
Lion d’argent au même festival. Belle performance pour un festival aussi
exigeant et consacré au cinéma d’auteur.
Zviagintsev fait très
fort puisqu’il remporte un premier prix pour son premier film. Un exploit
qui laisse présager une belle carrière pour ce cinéaste de 39 ans. La
performance a un précédent…chargé de symbole, en la personne d’Andreï
Tarkovski, qui reçut le Lion d’or en 1962 pour son premier film assez
méconnu « La jeunesse d’Ivan ».
Une ombre de tristesse
est passée sur le festival lorsqu’après la remise des prix, le réalisateur a
annoncé la mort d’un des acteurs du film, Andreï Garine il y a deux mois.
« Vous n’apercevez que deux acteurs ce soir sur la scène. Ceux qui ont vu le
film savent qu’il y a trois acteurs principaux. Mais l’acteur qui jouait
Andreï est mort. Nous voulons lui dédier cette récompense ».
Le jeune acteur de 15 ans
s’est noyé précisément à l’endroit que l’on aperçoit dans la première scène
du film, lorsque les enfants plongent dans le lac. Garine s’est noyé peu
après la fin du tournage.
Le film
raconte le retour au foyer d'un père mystérieusement disparu pendant douze
ans. Ses deux fils, Audrey et Ivan, ne se souviennent pas de lui et
ressentent des émotions assez contradictoires envers leur père. L'aîné s'y
attache rapidement tandis que le cadet reste en retrait, méfiant. Le père
entraîne ses fils dans un voyage initiatique parsemé d’embûches et de
conflits débouchants sur une catastrophe.
Les deux
fils sont incarnés par des acteurs bouillonnants d’énergie. Ils mangent la
pellicule et donne un rythme nerveux à la mise en scène – typiquement russe
– pleine de langueurs et de plans longs et magnifiques.
Les
rapports père / fils sont décidément dans l’air du temps en Russie ! On
retrouve exactement le même thème dans « Père et Fils », le dernier
Sokourov, et dans Koktebel, qui a remporté le prix spécial du jury au
Festival International du Film de Moscou. Qu’importe, les trois films sont
remarquables.
Quel paradoxe de voir
s’accumuler succès critiques et estime générale de la profession envers le
cinéma russe, alors que le public reste à l’écart ! A qui la faute ? Aux
distributeurs timorés, au mauvais goût du public ? On jette souvent la
pierre à l’envahissant cinéma américain mais force est de constater que ni
l’Etat, ni les distributeurs russes, ni enfin le public russe ne font
d’efforts pour soutenir leur cinéma.
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