Le
label Exotica héberge des groupes aux styles très divers. Qu’est-ce qui fait
l’identité du Label ?
Exotica est un label destine aux mélomanes, pour ceux qui comprennent la
musique et souhaitent écouter quelque chose de plus intéressant, moderne et
original, de moins banal que ce qu’on nous propose tous les jours à la radio
et à la télé, c’est à dire les tubes sans lendemain. Une musique qui n’est
pas une simple copie d’un tube précédent. Je porte mon attention sur tout ce
qui se fait dans le monde musical afin de promouvoir les tendances les plus
novatrices de la musique Russe. Je souhaite que la Russie compte au moins un
label qui ne soit pas source de honte, un label qui ait une bonne
réputation, reconnu pour son professionnalisme et qui fonctionne selon une
politique artistique cohérente. Nous souhaitons être respectés sur le plan
international et pas simplement sur le marché intérieur.
En
fait, Exotica est laboratoire à nouvelles idées, nous produisons de la
musique en boite, de la nourriture pour l’esprit. Mais c’est un produit
nouveau ici, et pour cette raison nous ne nous faisons pas d’illusion.
C’est beaucoup de travail.
Quels musiciens vous ont donné envie de créer le label ? Qui ont été les
premiers à signer dessus ?
J’ai
toute ma vie été un collectionneur de disques et de CDs. Ces 15 dernières
années j’ai été très impliqué de différentes manières dans le monde de la
musique. J’ai organisé des festivals, des concerts, réalisé des émissions
télévisés et radio, publié des magazines, écrit des articles, etc. J’ai
produit des artistes, sorti des albums et travaillé dans la distribution de
disques. C’est ce qui a fait qu’au bout d’un moment, rechercher des artistes
à travers la Russie est devenu ma principale tâche. J’ai fait en sorte
d’aider ces artistes de toutes les manières possibles : en programmant leurs
disques sur « Radio Russie », en les invitant à la télévision, en passant
leurs clips. Par l’organisation de concerts, de festivals. Parallèlement,
nombre de mes amis collectionneurs de disques sont passés progressivement de
la consommation de musique à la création. Ainsi, un nouveau groupe de
personne s’est formé autour du label Exotica au cours des années 90.
Certains d’entre eux n’étaient pas seulement d’intéressants musiciens mais
aussi des techniciens rompus aux techniques de studio. Je pense en
particulier à Ivan Sokolovski, le duo électronique Vidi Ryb (espèces de
poisson) qui étaient déjà parvenu à signer sur le label Hollandais
Staalplaat. C’est eux qui m’ont donné envie de créer le Label Exotica.
Toutefois la première sortie du label fut le premier album du groupe
Pétersbourgeois Ole Lukkoye. C’était en 1996. En 1999, Exotica a lancé le
sous-label Exotica Light, créé spécialement pour les musiques « lounge »,
easy listening, trip hop et consort. Il y a aujourd’hui 30 albums au
catalogue.
Quels sont les principaux projets d’Exotica pour 2003 ?
Nous
avons des gros projets comme toujours. Dr. Tikov, qui joue dans Netslov et
Mare Tranquilitate, va sortir un album « Astral Space Dub ». Le légendaire
groupe « Bratya po Razumu », qui s’est formé dans les années 80, va sortir
sur Exotica un album Lougne/Electro appelé « Hokus-Pokus ». Enfin, après 3
ans de silence, le groupe « Volga » sort un album très attendu « Vipei do
Dna » (Picole jusqu’à l’aube), qui est un heureux mélange de musique
traditionnelle et de musique électronique. Le 7ème volet de notre
compilation « porte les
nouvelles à Tchaïkovsky » va sortir et enfin une double compilation de
reprise des Beatles par des groupes électro Russes du Label sortira en début
d’année 2003.
Qu’est-ce
que vous considérez comme la principale réussite du label sur ces 10
dernières années ?
Le
monde musical change progressivement en Russie, et la plus grande réussite
du label est d’y avoir contribué par le biais des magazines, Cds, émissions
télévisions et radio. Le public a pu avoir accès à la nouvelle musique et la
possibilité du changement est en partie venu des changements de goûts de la
nouvelle génération.
Avec
quel label étrangers avez vous le plus de contacts ?
Il y
a un grand nombre de producteurs et de musiciens étrangers parmi nos amis.
Les plus célèbres sont Holger Czukay du groupe Can et les musiciens du
groupe Faust. Les labels allemands Klangbad, Think Progressive, le label
français Prikosnovenye (mot qui signifie effleurement), et le label italien
Musica Maxima Magnetica.
Quels sont les principaux obstacles que rencontre un label russe de taille
moyenne comme Exotica ?
Le
principal obstacle au développement du label est la grande indifférence
envers toute musique non-conformiste. Tout ce qui n’est pas formaté pop rock
FM pour les chaînes musicales. Les directeurs de programmes ne pensent qu’en
terme de profit immédiat, d’audience maximum. Leur rigidité s’oppose à
l’enthousiasme des Djs de radio et des producteurs télé, dont beaucoup sont
nos amis. La situation a franchit le seuil de l’absurde. Récemment, le
directeur marketing d’une Major moscovite se plaignait à moi du fait que
seule les productions occidentales passent en rotation sur les chaînes MTV
et Muz-TV. Que dire donc du monde musical russe ? Pas un seul morceau
instrumental n’est accepté à la radio, quelque soit le genre. Même
Tchaïkovski serait rejeté ! La seule radio avec qui nous avons collaboré
« station 2000 » a rapidement disparu. Le second problème est évidement le
piratage, qui a habitué le public à des prix extrêmement bas sur les CDs. Et
enfin, l’absence à l’heure actuelle d’un réseau de distribution digne de ce
nom.
Quels artistes du label sont le plus susceptibles de plaire à l’étranger ?
Certains de nos musiciens ont déjà connu des succès à l’étranger : Ole
Lukkoye fait des tournées chaque année en Europe. Les ventes de leur dernier
album « Christal Crow Bar » a vendu environ 10 000 exemplaires en Allemagne.
« Volga » a fait un concert devant 100 000 personnes lors du plus gros
festival Allemand de Burg Herzberg. Les Albums de « Vidi Ryb » sont
distribués par Staalplat en Europe par Soleilmoon aux Etats-Unis. Le premier
album de « Los Chicatilos » est devenu un collector 2 mois seulement après
sa sortie, et la même chose est arrivée à nos compilations « Dis les
nouvelles à Tchaïkovski ».
Certains journalistes ont écrit qu’il était difficile d’identifier un son
spécifique à la scène électronique russe.
Qu’en pensez-vous ?
Mais
qu’ont-ils donc écouté ? J’ai fait écouter des disques du label à un certain
nombre de connaisseurs occidentaux et tous ont marqué leur surprise et
exprimé un grand intérêt pour nos productions. Nos groupes sont constamment
sollicités à l’étranger. Rien que dans la dernière moitié de 2002, Nuclear
Los (Elan nuclaire) a été invité au festival d’Helsinki, Bigoudi en
Allemagne, Los Chicatilos en Suède. Mais le champion pour cela, c’est Alexei
Borisov et son projet F.R.U.I.T.S. Il a parcouru France, Belgique, Autriche
et Finlande. En plus il va aller jouer au Sonar de Barcelone. C’est pourquoi
je pense qu’il est grand temps de parler d’un son russe.
Si
vous aviez à choisir – mettons 5 groupes – pour présenter une émission sur
MTV-Europe sur la scène électronique russe, lesquels choisiriez-vous ?
Pour donner un
aperçu des différentes esthétiques, je dirais :
Bigoudi (retrofuturism/loungecore),
Volga (ethnoelectronic),
Zoom.Ra (experimental
funk/hip hop/electro),
Nuclear Los (trip hop/downtempo),
Brothers In Mind (electro/loungecore).
|