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Le Roi Roger

Szymanowski 

Bolchoï Theatre

Production de l'Opéra national de Pologne

Autres productions polonaises présentées au Bolchoï :

Evgueni Oneguine

Le Manoir Hanté

Direction musicale : Jacek Kaspszyk

Mise en scène : Mariusz Trelinski

Chorégraphie : Emil Wezolowski

Décors : Boris F. Kudlicka

Costumes : Magdalena Teslawska

Lumières : Stanislaw Zieba

 

 

Le Roi Roger : Wojciech Drabowisz

Roxana : Zofia Kilanowisz

Edrissi : Krzysztof Szmyt

Berger : Ryszard Minkiewisz

 

 

 

Le 15 décembre 2002

Premier de la série des trois opéras donnés au Bolchoï Theatre par l'Opéra National de Pologne, Le Roi Roger a impressionné par la qualité musicale de la partition, fort peu jouée en dehors des frontières polonaises. Composé par Szymanowsky et créé en 1926, l'opéra est d'une très grande beauté, dans un style très personnel qui ne peut être rapproché que du dernier Janacek.

 

Le livret - un peu obscur - conte les mésaventures d'un roi sicilien qui voit son pouvoir rongé et anéanti par l'arrivée d'un étrange prophète, simple berger mais doté d'un pouvoir de persuasion irrésistible. Son épouse et son peuple lui échappent, et finalement tout son pouvoir est anéanti. Le Roi est nu !

 

Des trois niveaux de lecture, religieux, sexuel et politique, le metteur en scène Mariusz Trelinski a choisi d'axer l'action sur le second. Dès le début, la séduction du prophète provient d'une beauté physique particulière, exotique et androgyne. Le trouble du Roi est évident et son autorité est immédiatement altérée.

 

Le compositeur avait placé l'opéra dans un contexte historique précis, celui de la Sicile du 12ème siècle, carrefour de toutes les influences du bassin méditerranéen, et où la chrétienté résistait farouchement à l'émergence de cultes hérétiques. Trelinski a effacé toute référence à la chrétienté mais souligne l'opposition entre la religion austère du Roi Roger, et le caractère orgiaque du culte prêché par le berger. Ce dernier ne tarde pas à faire apparaître sa nature bisexuelle et Trelinski nous fait intelligemment apparaître les ressors psychanalytiques de l’intrigue.

 

Les décors sont d’une grande beauté, les couleurs sombres, le pourpre et le mauve dominent, hormis le prophète et sa clique dont la blancheur factice éclate. L’atmosphère n’est que superficiellement mystique, les costumes extravagants font ressortir le caractère profondément libidineux de la secte. La mise en scène, les décors, costumes et lumières s’articulent avec bonheur et font preuve d’une très grande cohérence, d’une riche imagination.

 

Visuellement très réussit, la production souffre en revanche d’un problème d’équilibre entre les solistes et l’orchestre. Hormis Wojciech Drabowisz (le Roi Roger), tous les chanteurs peinent à passer un orchestre pourtant mesuré et subtil dirigé par Jacek Kaspszyk. Certes, le tissu orchestral est toujours très dense, et le problème vient sans doute en grande partie de l’orchestration. Il serait trop injuste de jeter la pierre aux chanteurs.

 

Naturellement, le très exigeant public du Bolchoï est resté sur sa faim d’autant que les voix de Zofia Kilanowicz (Roxana) et de Krzysztof Szmyt (Edrissi) sont agréables. Quant au ténor de Ryszard Minkiewisz (le berger), trop léger et manquant d’assise, il manquait de crédibilité. Il laissait la séduction s’exercer à travers son double danseur. C’est Drabowisz qui, très bon acteur également, a tenu la vedette grâce à sa très belle voix de baryton basse, noire et riche d’émotion.